10/06/2010
Le pain des français
Le pain des français...
Et la fille du boulanger.
Il est venu par le chemin
Qui passe devant la boulangerie
Un garçon au rire enfantin
Qui vagabonde dans la vie
Et c’est comme ça qu’un clair matin
Il vit la fille de vingt ans
Il lui demanda un morceau d’pain
Et son cœur se trouva content
Dans sa musette y avait trois pommes
De l’amitié pour tous les hommes
Lui qui était venu, useur de chemin
Rôdeur d’étoiles, buveur de pluie
a fixé un jour son destin
Et resta dans la boulangerie...
Vous avez compris, il est tombé amoureux de la fille du boulanger, et réciproquement, le papa n’y voyait pas d’inconvénient, à condition qu’il soit le compagnon dans le fournil pour que le pain continue d’être cuit dans la tradition.
Yves Montand interprétait cette chanson de Martin Trévières (Martin Techner) qu’Henri Crolla avait mise en musique, une de ces chansons mi-fable, mi-bluette, que la musique éclairait d’un soleil amical et bon enfant. C’était en 1958. Un peu plus tard en 1972, Fernand Raynaud mettra en scène un douanier assez obtus, qui ne supporte pas l’étranger qui vient manger le pain des français. Même si cet étranger est boulanger...
C’est donc avec une réjouissante pertinence qu’est arrivée la nouvelle en ce printemps 2010 : la meilleure baguette de pain, garantie traditionnelle, est l’œuvre d’un jeune boulanger que le douanier de Fernand aurait volontiers charterisé selon les us et coutumes qui s’insinuent dans le quotidien des français.
Parmi les valeurs immarcessibles qui font la grandeur de la France, personne ne contestera que la baguette de pain, c’est comme le « baîret » c’est français par essence !
Donc la chanson sera spécialement dédicacée à tous ceux qui viennent faire le pain des français, et à ce jeune boulanger de la rue des Abbesses, qui vient d’être distingué par un jury de consommateurs, Djibril Bodian, 33 ans, d'origine sénégalaise, boulanger au "Grenier à Pain" au cœur de Montmartre*, pas loin du café où officie Amélie Poulain . Et surtout aux gens de ce village de l’Isère qui ont résisté et empêché l’expulsion d’une jeune femme et son fils scolarisé.
Halima Krasniqi, 26 ans, et son fils Edi, 6 ans, demandeurs d'asile serbes, ont été « récupérés » in extremis par une action efficace des parents d’élèves, et l’arrêté d’expulsion a été cassé par le Tribunal. C’était hier, 9 juin 2010.
Peut-être qu’il sera boulanger, Edi, histoire de perpétuer le bon pain français.
Il se peut que l’équipe de foot plonge la France dans de noirs désespoirs, dans les semaines qui viennent, c’est pourquoi il me semblait utile de partager ces petites histoires de la vie qui sourit. Malgré tout.
Et qui prouvent qu’on n’est jamais à l’abri de deux bonnes nouvelles.
Norbert Gabriel
* C’est à une encablure de l’adresse qu’a occupé Saravah, à sa naissance, le seul label français de chanson, indépendant, vivant et ce depuis les années 66-70. Salut Pierre Barouh , le pain de Djibril doit avoir les mêmes saveurs que les tartines vendéennes du côté de La Morvient.
18:42 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : france, expulsion, nationalité, pain
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